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LA NOUVELLE ÉQUIPE

contre. À cause des enfants, moi, je suis bien obligé d’accepter la situation.

Ramenés à la pensée qui avait motivé leur visite, les deux frères échangèrent un regard.

— Mon cher Bourdeau, dit Maurice, parlez-nous franchement. Dans quelle situation laissez-vous votre famille ?

— Ma foi, Monsieur Maurice, nous n’étions point malheureux. Mon emploi est bon. Je n’ai jamais été malade, je n’ai jamais chômé. Ma femme qui est aidée par sa mère dans le ménage, fait un peu de confection pour les magasins et de couture pour des particuliers. En travaillant, on a toujours eu l’aisance à la maison. J’ai même quelques économies à la banque des coopératives. Si cette guerre n’est pas longue, comme je l’espère, et si je reviens, ma femme arrivera peut-être à s’en tirer. Mais, si je ne reviens pas…

Il fit un grand geste d’incertitude.

— Voyez-vous, poursuivit-il, si je ne reviens pas, puisqu’il faut tout prévoir, et si vous êtes mieux favorisés que moi, je veux bien que vous vous intéressiez aux enfants. Mon Robert est intelligent, et j’espérais en faire quelque chose.

Il s’arrêta. L’émotion lui coupait la parole, et ses yeux s’étaient brusquement mouillés.

— Jacques Bourdeau, dit Maurice, ému lui aussi, nous vous en faisons la promesse. Comme vous, nous pouvons être atteints ; mais si vous l’êtes et que nous soyons encore là, comptez sur nous.

— Merci, dit simplement le charpentier.

Aidée par Jeanne, et tandis que Louise était allée chercher quelques provisions supplémentaires, Mme Bourdeau avait préparé le déjeuner et dressé le couvert. Puis, on se mit à table. Le petit bébé mis au lit, la mère s’assit entre les deux enfants après avoir placé ses convives.