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LA NOUVELLE ÉQUIPE

que le général devait ignorer tout le drame qui allait se jouer autour de son petit-fils.

— Ses quatre-vingt-trois ans ne résisteraient pas à un coup pareil, conclut-elle.

— L’essentiel, disait Jeanne, ce serait qu’aucun journal ne tombe entre ses mains pendant les quelques jours où la presse relatera les détails de cette affaire.

— J’y veillerai, avait dit la grand’mère, mais depuis près d’une année c’est moi qui lui lis les journaux. La lecture le fatigue. Cela simplifiera pour moi la surveillance.

Lorsqu’elle avait quitté son père, le général avait dit à Jeanne :

— Et Pierre, il va bientôt être appelé pour son service militaire.

— Oui, papa, bientôt, en novembre, pensons-nous.

— Il n’a pas encore reçu sa feuille ?

— Non.

— J’espère qu’il sera sage, lui, hein ?

Jeanne avait frémi.

— Mais bien sûr, papa, voyons.

Le général avait eu un geste las, puis il avait dit de sa voix cassée :

— Ah, je sais bien qu’il ne fera pas ça avec goût. Le général Delmas n’a pas eu de chance voilà tout. Enfin, pourvu qu’il ne me déshonore pas, je ne demande plus autre chose.

Il y avait eu dans l’accent du vieillard une amertume si poignante que Jeanne l’avait quitté, bouleversée.

— Veille bien sur lui, maman, avait-elle dit, surveille les journaux et les visiteurs. Je te tiendrai au courant de tout.

Puis elle convint avec sa mère de lui écrire poste restante, et revint à Paris.

Henriette s’était chargée d’écrire au grand-père que Pierre était appelé à Nancy, et elle avait obtenu de son