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LA NOUVELLE ÉQUIPE

répondit Jeanne. Cette lettre, je ne l’ai jamais relue depuis que tu me l’as communiquée, mais en l’écoutant tout à l’heure, je disais presque, avec notre ami, que nous n’avions pas le droit d’en frustrer ceux qui, comme nous, cherchent la route de la sagesse.

— C’est mon avis, poursuivit Alexandre. Il y a, dans ce testament moral, des vues admirables, une élévation de la pensée, une clairvoyance, dont nous devons nous inspirer.

— Et remarquez, Didier, que mon mari a écrit cela en 1915. Il en était réduit à ses propres méditations. Rien n’était connu, alors, des responsabilités de la guerre, de la duplicité des chancelleries, des mensonges gouvernementaux, des hypocrisies de la presse. Il n’a pu juger que du seul point de vue philosophique.

— Il a jugé clairement, cependant. Et tout ce que nous savons aujourd’hui, tout ce qui nous a été révélé en ces dernières années, renforce encore le jugement qu’il exprime. La guerre nous menacera aussi longtemps que nous accepterons les idéologies qui la rendent possible.

Jacques Bourdeau éclate :

— Et que nous nous laisserons gouverner par tous les bandits qui ont encore sur leurs mains le sang des pauvres poilus.

— Sans compter, dit Jean à son tour, que les mêmes fautes se renouvellent. Nos diplomates trafiquent du jeu des alliances, la Pologne remplaçant pour nous la Russie. La nouvelle carte d’Europe mécontente tout le monde. Une injustice criante accable les vaincus. Autant de dangers pour la paix.

Didier intervint.

— Et n’oublie pas la presse qui ne cesse pas son odieuse besogne de division, d’excitations chauvines, de mensonges criminels.

— Comme en 14, alors, reprit Bourdeau. Ah ! mais,