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LA NOUVELLE ÉQUIPE

d’emprisonnement ne permettait pas de croire qu’on serait plus indulgent pour Pierre Bournef, surtout avec autant de rapprochement entre les deux affaires. Et surtout, comme l’avait fait observer si justement le jeune homme, après les campagnes de presse que Didier avait soulevées, et entretenues avec la revue.

Pourtant, ainsi qu’il l’avait dit, le 28 octobre au soir Pierre mettait à la poste le pli qui contenait son refus d’obéissance à la loi militaire. Ce soir-là en embrassant sa mère il lui dit :

— Mère chérie, soyons calmes, attendons les événements avec la fermeté des consciences libres. Nous avons à présent la certitude que les souffrances de mon père n’ont pas été vaines.

— Mais tu vas souffrir aussi, toi !

— Pour l’avénement d’un monde nouveau, mère ; et souviens-toi que toute naissance demande la douleur, même quand c’est pour l’avènement de l’amour.


II


Si Charles Tissier avait été fier du succès de son fils au concours de l’agrégation, il n’en avait pas moins conservé un vif ressentiment contre lui à propos de l’attitude prise par le jeune homme lors de la pétition des normaliens. Il n’avait pas compris les raisons qui l’avaient déterminé à se refuser au grade d’officier. Il n’y avait vu qu’une extravagance d’idées, un besoin de se distinguer des autres, en tous cas un bien inutile sacrifice.

— La belle affaire, avait-il dit, qu’il y ait un officier de plus ou de moins. Si tu crois que ton geste servira à quelque chose.

Jean avait jugé inutile de répondre, et comme toujours s’était renfermé dans le mutisme.