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LA NOUVELLE ÉQUIPE

fiait par l’égalité de tous les citoyens devant la loi.

— Sans doute, dit encore Renoir, ce raisonnement est juste, si l’on admet que la loi civique soit souveraine ; mais au-dessus de la loi civique, il y a la loi morale. Celle du Christ, par exemple.

— Il est un peu tard pour la faire valoir, dit un interrupteur, du fond de la salle.

Renoir répliqua :

— Pardon ! il y a toujours eu des chrétiens qui ont protesté contre la guerre et l’usage des armes. Ils n’ont pas été nombreux, je vous l’accorde, mais ce n’est pas une raison pour les méconnaître. Il y en eut dans tous les temps. Sans doute, c’eût été le rôle même de l’Église Chrétienne de s’opposer à la guerre ; mais elle eut le tort de s’allier aux puissances politiques, et perdit toute sa force morale du fait même de cette alliance. Du moins dans cette église qui faisait fausse route, il resta des consciences libres, qui avaient compris la pensée du Christ. Ceux-là ont proclamé l’indépendance de l’esprit en répudiant l’autorité des puissances temporelles. C’est eux, peut-être, qui ont permis à la pensée libre de continuer sa route. C’est eux, peut-être, qui vous permettent aujourd’hui de vous appuyer sur des forces morales pour combattre les forces de la violence.

L’interrupteur voulut répondre. Didier intervint.

— Mais non, voyons, pas de discussions vaines. Renoir a parfaitement raison. Les chrétiens qui conservèrent l’esprit du Christ, dans ses principes essentiels de vie, de liberté et d’amour, ont sauvé la liberté morale des hommes et sont les précurseurs de la conscience moderne. Il n’est pas de libre-penseur de bonne foi qui ne le reconnaisse. Ne perdons pas notre temps en des contradictions inutiles. Continue donc, Grand-jean.

— Je reviens à mon point de départ. La conscription obligatoire, ai-je dit, se justifiait par l’obligation