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LA NOUVELLE ÉQUIPE

« Le sang de tous les hommes est le même que celui que le Christ versa sur le Calvaire »…

Soudainement, Didier eut la vision du chargement de blé se dessinant sur la plaine nue où la moisson venait d’être faite. Toutes ses pensées d’alors lui revinrent. Le blé qui nourrit tous les hommes. La sève de la terre et le sang des artères, la vie universelle qui enveloppe l’humanité. Pas un homme, avait-il pensé, n’en pouvait mutiler un autre sans attenter à lui-même ! Le pasteur ne venait-il pas de dire les mêmes choses ? La terre nourricère, cette Alma Mater des hommes, et le Père qui était dans les Cieux, n’est-ce pas la même image de vie et d’amour ?

Cependant les deux jeunes filles faisaient le service de la table, présentaient tour à tour, à chacun, les aliments préparés. La plus jeune était très blonde, avec ses nattes flottant sur les épaules ; l’aînée, aux cheveux châtains, avait ses nattes enroulées en couronne autour de la tête. Toutes les deux avaient la grâce et la douceur de la jeunesse. Elles semblaient être la bénédiction même appelée par le pasteur. Elles étaient la vie, la vie que les hommes n’avaient pas comprise encore.

— C’est si simple, pourtant, tout cela, pensait Didier.

Vers la fin du repas, il se leva, et au nom de ses compatriotes il remercia l’hôtesse et le pasteur ; puis, tourné vers les jeunes filles, il leur demanda de chanter l’Hymne à la Joie de Beethoven.

— Je n’ignore pas, dit-il, la gravité douloureuse de l’heure qui nous réunit. Mais je vous demande de nous chanter ce chant comme une évocation des temps nouveaux que nos cœurs appellent.

Les jeunes filles, du regard, consultèrent leur mère. Celle-ci fit un signe affirmatif, et les deux voix pures firent entendre l’hymne splendide où le musicien et le