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LA NOUVELLE ÉQUIPE

Pagnanon quittait Paris pour les régions dévastées. Maurice et Jeanne s’étaient bien émus de sa détermination ; ils lui avaient présenté toutes les objections qu’en leur conscience ils croyaient devoir faire. Mais devant l’inébranlable assurance de sa foi, ils n’avaient pu que s’incliner.

Quand il leur avait fait ses adieux, Maurice lui avait dit en lui serrant la main :

— Allez, jeune apôtre de la réconciliation, allez porter votre cœur plein d’amour sur ces chemins sanglants où l’humanité affolée a semé la haine et la mort. On ne vous comprendra peut-être pas dans le présent ; mais votre geste portera des fruits dans l’avenir.

Jeanne l’avait attiré dans ses bras et l’avait maternellement embrassé.

— Cher enfant, dit-elle, c’est la bénédiction d’une mère que je vous donne. Souvenez-vous qu’ici vous laissez une famille qui comprend votre pensée. Nous ne voulons pas vous affaiblir ; mais si, pourtant, vous ne trouviez pas l’accueil que vous espérez, n’hésitez pas à revenir près de nous.

Henriette et Pierre accompagnèrent leur ami à la gare du Nord. Ils avaient le cœur serré en songeant aux épreuves qui l’attendaient. Mais lui n’y songeait pas. Il était presque gai. Sac au dos, bien sanglé dans un complet de velours à culottes courtes, chaussé de gros souliers, il avait l’air d’un globe-trotter partant à l’aventure. Pourtant il était ému. Avant de monter en wagon, il étreignit ses deux jeunes amis, mit un baiser sur le front d’Henriette, promit d’écrire dès le lendemain. Puis, quand le train s’ébranla, il leur dit encore adieu par la portière, les yeux brillants de douleur et de foi, un grand sourire tendre éclairant ses lèvres.