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LA NOUVELLE ÉQUIPE

— La guerre a assuré leur puissance, c’était fatal, car ils sont maintenus au pouvoir par tous ceux qui, pendant quatre ans, se sont taillés la part du lion.

Cependant Jeanne et Henriette avaient préparé le goûter. Éliane et Julien, à leur tour étaient venus prendre place parmi les causeurs. La conversation se trouva, pour un moment, détournée de son cours.

— À propos, dit tout à coup le colonel, je veux vous communiquer le contenu d’une lettre que j’ai reçue, ces jours derniers, de cette vieille amie de l’Isère dont je vous ai parlé, Marie Guerrier, si bizarrement mal nommée, car jamais personne plus pacifique ne fut au monde, et jamais la paix ne compta plus zélée propagandiste.

Henriette interrompit gaiement le causeur :

— Colonel, voulez-vous une tartine ? demanda-t-elle.

— Chère enfant, j’ai bien envie de répondre non, pour vous punir de me donner un titre militaire, comme si ce jardin charmant était une vulgaire cour de caserne.

— C’était pour vous taquiner, mais je ne le ferai plus, je vous assure.

— J’en prends note, et en récompense, j’accepte la tartine.

— Vous disiez donc, cher ami, questionna Maurice.

— Que j’ai reçu une lettre de ma vieille amie. Elle me parle d’un jeune instituteur de l’Isère, qu’elle a connu il y a près de deux ans, et auquel elle s’est si vivement attachée qu’il lui a donné le nom de Grand’-Maman.

— Il est sans famille, sans doute ?

— Pas précisément. Son père est mort alors qu’il était tout enfant ; mais il a encore sa mère. C’est une paysanne un peu fruste. Malgré l’affection qu’il a pour elle, le jeune homme se trouve moralement isolé. C’est