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AVENTURES DU CAPITAINE HATTERAS

docteur prit ses instruments pour aller faire son point et déterminer le relevé hydrographique d’une partie de la baie.

Hatteras pressait le travail ; il avait hâte de partir ; il voulait avoir quitté la terre ferme et pris les devants, au cas où quelque détachement arriverait à la mer.

À cinq heures du soir, Johnson et Bell n’avaient plus qu’à se croiser les bras. La chaloupe se balançait gracieusement dans le petit havre, son mât dressé, son foc halé bas et sa misaine sur les cargues ; les provisions et les parties démontées du traîneau y avaient été transportées ; il ne restait plus que la tente et quelques objets de campement à embarquer le lendemain.

Le docteur, à son retour, trouva ces apprêts terminés. En voyant la chaloupe tranquillement abritée des vents, il lui vint à l’idée de donner un nom à ce petit port, et proposa celui d’Altamont.

Cela ne fit aucune difficulté, et chacun trouva la proposition parfaitement juste.

En conséquence, le port fut appelé Altamont-Harbour.

Suivant les calculs du docteur, il se trouvait situé par 87° 05′ de latitude et 118° 35′ de longitude à l’orient de Greenwich, c’est-à-dire à moins de du pôle.

Les voyageurs avaient franchi une distance de deux cents milles depuis la baie Victoria jusqu’au port Altamont.


CHAPITRE XXI. — LA MER LIBRE.

Le lendemain matin, Johnson et Bell procédèrent à l’embarquement des effets de campement. À huit heures, les préparatifs de départ étaient terminés. Au moment de quitter cette côte, le docteur se prit à songer aux voyageurs dont on avait rencontré les traces, incident qui ne laissait pas de le préoccuper.

Ces hommes voulaient-ils gagner le nord ? avaient-ils à leur disposition quelque moyen de franchir l’océan polaire ? Allait-on encore les rencontrer sur cette route nouvelle ?

Aucun vestige n’avait, depuis trois jours, décelé la présence de ces voyageurs, et certainement, quels qu’ils fussent, ils ne devaient point avoir atteint Altamont-Harbour. C’était un lieu encore vierge de tout pas humain.

Cependant, le docteur, poursuivi par ses pensées, voulut jeter un dernier coup d’œil sur le pays, et il gravit une éminence haute d’une centaine de pieds au plus ; de là, son regard pouvait parcourir tout l’horizon du sud.