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LE DÉSERT DE GLACE

Le 29, Bell tua un renard, et Altamont fut assez heureux pour abattre un bœuf musqué de moyenne taille, après avoir donné à ses compagnons une haute idée de son sang-froid et de son adresse ; c’était vraiment un merveilleux chasseur, et le docteur, qui s’y connaissait, l’admirait fort. Le bœuf fut dépecé et fournit une nourriture fraîche et abondante.

Ces hasards de bons et succulents repas étaient toujours bien reçus ; les moins gourmands ne pouvaient s’empêcher de jeter des regards de satisfaction sur les tranches de chair vive. Le docteur riait lui-même, quand il se surprenait en extase devant ces opulents morceaux.

« Ne faisons pas les petites bouches, disait-il ; le repas est une chose importante dans les expéditions polaires.

— Surtout, répondit Johnson, quand il dépend d’un coup de fusil plus ou moins adroit !

— Vous avez raison, mon vieux Johnson, répliquait le docteur, et l’on songe moins à manger lorsqu’on sait le pot-au-feu en train de bouillir régulièrement sur les fourneaux de la cuisine. »

Le 30, le pays, contrairement aux prévisions, devint très-accidenté, comme s’il eût été soulevé par une commotion volcanique ; les cônes, les pics aigus se multiplièrent à l’infini et atteignirent de grandes hauteurs.

Une brise du sud-est se prit à souffler avec violence et dégénéra bientôt en un véritable ouragan ; elle s’engouffrait à travers les rochers couronnés de neige et parmi des montagnes de glace, qui, en pleine terre, affectaient cependant des formes d’hummocks et d’ice-bergs ; leur présence sur ces plateaux élevés demeura inexplicable, même au docteur, qui cependant expliquait tout.