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LE DÉSERT DE GLACE

Pendant les deux premiers jours du voyage, on marcha à raison de vingt milles par douze heures ; le reste du temps était consacré aux repas et au repos ; la tente suffisait à préserver du froid pendant les instants du sommeil.

La température tendait à s’élever ; la neige fondait entièrement par endroits, suivant les caprices du sol, tandis que d’autres places conservaient leur blancheur immaculée ; de grandes flaques d’eau se formaient çà et là, souvent de vrais étangs, qu’un peu d’imagination eût fait prendre pour des lacs ; les voyageurs s’y enfonçaient parfois jusqu’à mi-jambes ; ils en riaient, d’ailleurs ; le docteur était heureux de ces bains inattendus.

« L’eau n’a pourtant pas la permission de nous mouiller dans ce pays, disait-il ; cet élément n’a droit ici qu’à l’état solide et à l’état gazeux ; quant à l’état liquide, c’est un abus ! Glace ou vapeur, très-bien ; mais eau, jamais ! »

La chasse n’était pas oubliée pendant la marche, car elle devait procurer une alimentation fraîche ; aussi Altamont et Bell, sans trop s’écarter, battaient les ravines voisines ; ils tiraient des ptarmigans, des guillemots, des oies, quelques lièvres gris ; ces animaux passaient peu à peu de la confiance à la crainte, ils devenaient très-fuyards et fort difficiles à approcher. Sans Duk, les chasseurs en eussent été souvent pour leur poudre.

Hatteras leur recommandait de ne pas s’éloigner de plus d’un mille, car il n’avait ni un jour ni une heure à perdre, et ne pouvait compter que sur trois mois de beau temps.

Il fallait, d’ailleurs, que chacun fût à son poste près du traîneau, quand un endroit difficile, quelque gorge étroite, des plateaux inclinés, se présentaient à