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LE DÉSERT DE GLACE

Mais, tout d’un coup, la surface du trou vint à s’agiter ; l’amphibie remontait pour respirer ; l’ours se coucha tout de son long sur le champ glacé et arrondit ses deux pattes autour de la crevasse.

Un instant après, le phoque apparut, la tête hors de l’eau ; mais il n’eut pas le temps de l’y replonger ; les pattes de l’ours, comme détendues par un ressort, se rejoignirent, étreignirent l’animal avec une irrésistible vigueur, et l’enlevèrent hors de son élément de prédilection.

Ce fut une lutte rapide ; le phoque se débattit pendant quelques secondes et fut étouffé sur la poitrine de son gigantesque adversaire ; celui-ci, l’emportant sans peine, bien qu’il fût d’une grande taille, et sautant légèrement d’un glaçon à l’autre jusqu’à la terre ferme, disparut avec sa proie.

« Bon voyage ! lui cria Johnson ; cet ours-là a un peu trop de pattes à sa disposition. »

La chaloupe regagna bientôt la petite anse que Bell lui avait ménagée entre les glaces.

Quatre jours séparaient encore Hatteras et ses compagnons du moment fixé pour leur départ.

Hatteras pressait les derniers préparatifs ; il avait hâte de quitter cette Nouvelle-Amérique, cette terre qui n’était pas sienne et qu’il n’avait pas nommée ; il ne se sentait pas chez lui.

Le 22 juin, on commença à transporter sur le traîneau les effets de campement, la tente et les provisions. Les voyageurs emportaient deux cents livres de viande salée, trois caisses de légumes et de viandes conservées, cinquante livres