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famille nicolef.

Rien qu’en Livonie, ces Allemands possèdent la plus grande partie du domaine rural, au moins quatre cent mille hectares. »

De fait, ceci est exact. Dans les provinces Baltiques, les nobles, les citoyens honoraires, bourgeois et marchands, sont presque exclusivement d’origine teutonne. Il est vrai, bien que converti par ces Allemands, catholiques d’abord, protestants ensuite, le peuple n’a jamais pu être germanisé. Les Esthes, ces frères des Finnois, et les Lettes, presque tous agriculteurs sédentaires, ne cachent point leur antipathie de race pour ceux qui sont leurs maîtres, et à Revel, à Dorpat, à Pétersbourg, nombre de journaux s’occupent à défendre leurs droits !

Alors le consul d’ajouter :

« Dans une lutte entre les Russes d’origine slave et les Russes d’origine allemande, je ne sais trop qui l’emportera !

— Laissons faire l’Empereur, répondit le docteur Hamine. C’est un Slave de pure race, lui, et il saura bien réduire l’élément étranger dans nos provinces.

— Finira-t-il par réussir ! répondit la jeune fille d’une voix grave. Depuis sept cents ans, depuis la conquête, nos paysans, nos ouvriers, ont résisté à la pression des conquérants, et ceux-ci sont restés en dehors du pays !

— Et ton père, ma chère Ilka, déclara le docteur, aura vaillamment combattu pour notre cause !… C’est à juste titre qu’il est à la tête du parti slave.

— Non sans s’être fait de terribles ennemis !… observa M. Delaporte.

— Entre autres, répliqua le docteur, les frères Johausen, ces riches banquiers qui crèveront de dépit le jour où Dimitri Nicolef leur aura enlevé la direction de la municipalité rigane !… Après tout, notre ville ne compte que quarante-quatre mille Allemands contre vingt-six mille Russes et vingt-quatre mille Lettes… Les