Page:Verne - Un drame en Livonie, illust Benett, 1905.djvu/220

Cette page a été validée par deux contributeurs.
204
un drame en livonie.

Presque aussitôt arrivèrent le docteur Hamine, M. Delaporte, quelques-uns des amis de la famille. Wladimir fut félicité, embrassé de tous. Ces accusations qui avaient accablé le professeur, qui y songeait à présent ?…

« Quand bien même vous eussiez été condamné, lui dit M. Delaporte, pas un de nous n’eût douté de votre innocence !

— Condamné !… s’écria le docteur. Est-ce qu’il aurait jamais pu l’être ?…

— Et si une condamnation eût été prononcée, déclara Ilka, Wladimir, Jean et moi nous aurions consacré notre vie à poursuivre ta réhabilitation, mon père ! »

Dimitri Nicolef, le cœur oppressé, la figure pâlie par les émotions, ne put prononcer une parole. Il souriait tristement. Ne se disait-il pas qu’on peut tout attendre de l’incertaine justice des hommes ?…

N’a-t-on pas trop d’exemples de condamnations iniques et souvent irréparables ?…

La soirée réunit, autour du thé, les plus intimes amis de Wladimir et de Nicolef. Et comme les cœurs battirent, et quelles démonstrations de joie se manifestèrent, lorsque, très simplement, Ilka dit :

« Quand vous le voudrez, Wladimir, je serai votre femme ! »

Le mariage fut fixé à six semaines de là, et l’on disposa une chambre au rez-de-chaussée de la maison pour Wladimir Yanof. La fortune des deux fiancés était connue. Ilka n’avait rien et, jusqu’alors, Nicolef s’était tu sur sa situation, sur ses engagements envers la maison Johausen pour les dettes paternelles. À force d’économie, il en avait payé une bonne part, et il espérait toujours pouvoir s’acquitter du reste. Voilà pourquoi il n’avait rien dit à ses enfants, et pourquoi ils ne savaient pas que la dernière créance de dix-huit mille roubles venait à échéance dans quinze jours. Il faudrait bien qu’il en fît l’aveu pourtant. Wladi-