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un drame en livonie.

innocence !… Jamais ils n’en douteraient, et ils ne lui épargnèrent pas les marques de la plus sincère affection.

Puis, dans cette salle où ils étaient réunis, tandis qu’une foule de gens malintentionnés affluaient devant la maison, Dimitri Nicolef dut raconter ce qui s’était passé dans le cabinet du juge, dire les préventions que le major Verder ne dissimulait pas, rendre hommage à l’attitude digne et réservée de M. Kerstorf. Toutefois, il le fit brièvement, d’une voix saccadée, en homme auquel il répugnait de revenir sur ces détails.

On comprit que le professeur avait besoin de se reposer, d’être seul, peut-être même de chercher dans le travail l’oubli de si terribles épreuves, et ses amis prirent congé.

Jean se retira dans la chambre de sa sœur, et Dimitri Nicolef alla s’enfermer dans son cabinet.

En sortant, M. Delaporte dit au docteur :

« Les esprits sont montés, mon cher ami, et, bien que M. Nicolef soit innocent, il est de toute nécessité que l’on découvre le vrai coupable, ou la haine de ses ennemis ne cessera de le poursuivre !

— Cela est très à craindre, répondit le docteur. Si jamais j’ai désiré que l’on mît la main sur un criminel, c’est bien dans cette affaire !… La mort de Poch va être exploitée par les Johausen, et ce Karl qui n’a même pas attendu que l’accusation fût prouvée pour traiter Jean de fils d’assassin !…

— Aussi ai-je peur, fit observer M. Delaporte, que ce ne soit pas fini entre ce Karl et lui !… Vous connaissez Jean… Il voudra se venger en vengeant son père !…

— Non… non, répliqua le docteur, il ne faut pas qu’il commette une imprudence dans l’état actuel des choses !… Ah !… le maudit voyage, et pourquoi Dimitri l’a-t-il fait, et pourquoi a-t-il eu l’idée de le faire ! »

C’était bien ce que se demandaient les enfants et les amis de