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un drame en livonie.

M. Frank Johausen, assis près de la fenêtre, s’abandonnait au tumulte de ses pensées. Il voulait croire que le brigadier ne s’était pas trompé, et pourtant sentait comme un instinct de justice se révolter en lui contre la vraisemblance d’une telle accusation.

L’agent revint et fit connaître le résultat de sa démarche :

M. Dimitri Nicolef était parti de Riga le 13, de grand matin, et il n’était pas encore de retour.

C’était la confirmation des révélations du brigadier Eck.

« J’avais donc raison, monsieur le major, dit-il. Dimitri Nicolef a quitté son domicile le 13, dès l’aube… Poch et lui ont pris place dans la malle-poste… L’accident de voiture s’est produit vers sept heures du soir, et les deux voyageurs sont entrés à huit heures au kabak de la Croix-Rompue, où tous deux ont passé la nuit… Si donc l’un des voyageurs a assassiné l’autre, c’est Dimitri Nicolef qui est l’assassin ! »

M. Frank Johausen se retira, à la fois confondu et triomphant de cette terrible nouvelle.

Elle ne pouvait tarder à s’ébruiter.

Ce fut, à travers la ville, comme une traînée de poudre qu’une étincelle eût enflammée !… Dimitri Nicolef l’auteur du crime de la Croix-Rompue !

Heureusement, cela ne fut pas connu d’Ilka Nicolef. La maison resta close à ce bruit. Le docteur Hamine y veilla.

Le soir, lorsque M. Delaporte et lui se rencontrèrent dans la salle, pas un mot ne fut prononcé à ce sujet. D’ailleurs, ils avaient haussé les épaules… Nicolef, un assassin !… Ils refusaient de le croire.

Mais le télégraphe avait joué. Les brigades de police du territoire étaient prévenues : ordre d’arrêter Dimitri Nicolef si elles le découvraient.

Et c’est ainsi que cette nouvelle était parvenue à Dorpat, dans