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UN CAPITAINE DE QUINZE ANS

— Eh bien, tâchons qu’elle nous repose de tant de fatigues ! Voici, depuis dix jours, la première fois que nous n’aurons pas dormi en plein air !

— Dix jours ! répéta Tom.

— D’ailleurs, ajouta Dick Sand, puisque ce cône forme un solide abri, peut-être conviendra-t-il d’y demeurer vingt-quatre heures. Pendant ce temps, j’irai reconnaître le cours d’eau que nous cherchons et qui ne peut être éloigné. Je pense même que, jusqu’au moment où nous aurons construit un radeau, mieux vaudra ne pas quitter cet abri. L’orage ne saurait nous y atteindre. Faisons-nous donc un sol plus résistant et plus sec. »

Les ordres de Dick Sand furent aussitôt exécutés. Hercule fit ébouler avec sa hache le premier étage d’alvéoles, qui se composait d’argile assez friable. Il exhaussa ainsi d’un bon pied la partie intérieure du terrain marécageux sur lequel reposait la fourmilière, et Dick Sand s’assura que l’air pouvait librement pénétrer à l’intérieur du cône à travers l’orifice percé à sa base.

C’était, certes, une heureuse circonstance que la fourmilière eût été abandonnée par les termites. Avec quelques milliers de ces fourmis, elle eût été inhabitable. Mais avait-elle été évacuée depuis longtemps, ou ces voraces névroptères venaient-ils seulement de la quitter ? Il n’était pas superflu de se poser cette question.

Cousin Bénédict se l’était posée tout d’abord, tant il était surpris d’un tel abandon, et il fut bientôt convaincu que l’émigration avait été récente.

En effet, il ne tarda pas à redescendre à la partie inférieure du cône, et là, éclairé par la lanterne, il se mit à fureter les coins les plus secrets de la fourmilière. Il découvrit ainsi ce qu’il appela le « magasin général » des termites, c’est-à-dire l’endroit où ces industrieux insectes entassaient les provisions de la colonie.

C’était une cavité creusée dans la paroi, non loin de la cellule royale, que le travail d’Hercule avait fait disparaître, en même temps que les cellules destinées aux jeunes larves.

Dans ce magasin, cousin Bénédict recueillit une certaine quantité de parcelles de gomme et de sucs de plantes à peine solidifiés, — ce qui prouvait que les termites les avaient nouvellement apportés du dehors.

« Eh bien non, s’écria-t-il, non ! comme s’il eût répondu à quelque contradiction qui lui eût été faite. Non ! cette fourmilière n’a pas été abandonnée depuis longtemps !

— Qui vous dit le contraire, monsieur Bénédict ? répondit Dick Sand. Récem-