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LA TRAITE

cap de Bonne-Espérance jusque sur le haut Zambèse. De là, au mois de novembre{lié}1853, avec une hardiesse qui n’a jamais été surpassée, il traversait l’Afrique du sud au nord-ouest, franchissait le Coango, l’un des affluents du Congo, et arrivait le 31 mai 1854 à Saint-Paul de Loanda. C’était la première percée faite dans l’inconnu de la grande colonie portugaise.

Dix-huit ans après, deux audacieux découvreurs allaient traverser l’Afrique de l’est à l’ouest, et ressortir, l’un au sud, l’autre au nord de l’Angola, au prix de difficultés inouïes.

Le premier en date, c’est le lieutenant de la marine anglaise Verney-Howet Cameron. En 1872, on avait lieu de penser que l’expédition de l’Américain Stanley, envoyée à la recherche de Livingstone dans la région des grands lacs, était fort compromise. Le lieutenant Cameron offrit d’aller retrouver ses traces. L’offre fut acceptée. Cameron, accompagné du docteur Dillon, du lieutenant Cecil Murphy et de Robert Moffat, neveu de Livingstone, partit de Zanzibar. Après avoir traversé l’Ougogo, il rencontra le corps de Livingstone que ses fidèles serviteurs ramenaient à la côte orientale. Continuant alors sa route à l’ouest avec l’inébranlable volonté de passer d’un littoral à l’autre, traversant l’Ounyanyembé, l’Ougounda, Kahouélé où il recueillit les papiers du grand voyageur, franchissant le Tanganyika, les montagnes du Bambarré, le Loualâba dont il ne put redescendre le cours, après avoir visité toutes ces provinces dévastées par la guerre, dépeuplées par la traite, le Kilemmba, l’Ouroua, les sources du Lomané, l’Oulouda, le Lovalé, après avoir franchi la Coanza et ces immenses forêts dans lesquelles Harris venait d’égarer Dick Sand et ses compagnons, l’énergique Cameron apercevait enfin l’océan Atlantique et arrivait à Saint-Philippe de Benguela. Ce voyage de trois ans et quatre mois avait coûté la vie à deux de ses compagnons, le docteur Dillon et Robert Moffat.

À l’Anglais Cameron allait presque aussitôt succéder l’Américain Henry Moreland Stanley dans cette voie des découvertes. On sait que cet intrépide correspondant du New-York Herald, envoyé à la recherche de Livingstone, l’avait retrouvé le 30 octobre 1871 à Oujiji sur les bords du lac Tanganyika. Mais ce qu’il venait de faire si heureusement au point de vue de l’humanité, Stanley voulut le recommencer dans l’intérêt de la science géographique. Son objectif fut alors la complète reconnaissance du Loualâba qu’il n’avait fait qu’entrevoir. Cameron était encore perdu dans les provinces de l’Afrique centrale, lorsque Stanley, en novembre 1874, quittait Bagamoyo sur la côte orientale, abandonnait, vingt et un mois après, le 24 août 1876, Oujiji, décimée par une épidémie de variole,