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HARRIS

à Dick Sand un regard qui ne fut compris que de lui, et, si ce n’est pas lui, qui est-ce donc ?

— Nous allons le savoir, mistress Weldon », répondit le novice.

Puis, s’adressant à Bat, à Austin et à Hercule :

« Armez-vous, mes amis, et venez ! »

Chacun des noirs prit un fusil et un coutelas, ainsi qu’avait fait Dick Sand. Une cartouche fut glissée dans la culasse des remingtons, et, ainsi armés, tous quatre se dirigèrent vers la berge de la rivière.

Mrs Weldon, Tom, Actéon, restèrent à l’entrée de la grotte, où le petit Jack et Nan se trouvaient encore.

Le soleil se levait alors. Ses rayons, interceptés par les hautes montagnes de l’est, n’arrivaient pas directement à la falaise ; mais, jusqu’à l’horizon occidental, la mer étincelait sous les premiers feux du jour.

Dick Sand et ses compagnons suivaient à mi-grève le rivage dont la courbe se raccordait à l’embouchure de la rivière.

Là, Dingo, immobile et comme en arrêt, aboyait toujours. Il était évident qu’il voyait ou sentait quelque indigène.

Et, en effet, ce n’était plus à Negoro, à son ennemi du bord, cette fois, que le chien en voulait.

Un homme tournait, en ce moment, le dernier pan de la falaise. Il s’avançait prudemment sur la berge, et, par ses gestes familiers, il cherchait à calmer Dingo. Il ne se souciait pas, on le comprenait, d’affronter la colère du vigoureux animal.

« Ce n’est pas Negoro ! dit Hercule.

— Nous ne pouvons perdre au change ! répondit Bat.

— Non, dit le novice. C’est probablement quelque indigène, qui nous épargnera l’ennui d’une séparation. Nous allons donc enfin savoir exactement où nous sommes ! »

Et tous quatre, remettant leurs fusils sur l’épaule, se dirigèrent rapidement vers l’inconnu.

Celui-ci, en les voyant s’approcher, donna, tout d’abord, les marques de la plus vive surprise. Très certainement, il ne s’attendait pas à rencontrer des étrangers sur cette partie de la côte. Évidemment aussi, il n’avait pas encore aperçu les débris du Pilgrim, sans quoi, la présence de naufragés se fût expliquée tout naturellement pour lui. D’ailleurs, pendant la nuit, le ressac avait achevé de démolir la carcasse du navire, et il n’en restait plus que des épaves qui flottaient au large.