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seconde patrie.

pas trop certain que, si le bâtiment s’éloignait, il ne reviendrait pas sur ces parages…

La nuit arrivée, les violences de la tempête s’accrurent. Sur la recommandation de M. Zermatt, que ses enfants obligèrent à prendre quelque repos, Fritz, Ernest, Jack et François se relayèrent jusqu’au jour. De la galerie, qu’ils ne quittèrent pas, ils voyaient la mer jusqu’à l’îlot du Requin. Si un feu de navire eût paru à l’entrée du goulet, ils l’auraient aperçu ; si une détonation eût retenti, ils l’auraient entendue, malgré le tumulte des lames qui brisaient sur les roches de la crique avec un effroyable fracas. Lorsque la rafale s’apaisait un peu, enveloppés de leur capote cirée, tous quatre, s’avançant jusqu’à l’embouchure du ruisseau des Chacals, s’assuraient que la chaloupe et la pinasse tenaient bon à leur mouillage.

La tourmente dura quarante-huit heures. À peine si, pendant tout ce temps, M. Zermatt et ses fils avaient pu se porter jusqu’à mi-chemin de Falkenhorst afin d’embrasser du regard un plus large horizon. La mer, toute blanche de l’écume des lames déferlantes, était déserte. En réalité, pas un bâtiment n’eût osé se risquer si près de terre pendant cette tempête.

M. et Mme Zermatt avaient déjà fait le sacrifice de leurs espérances. Ernest, Jack, François, habitués à cette existence depuis leur jeune âge, ne regrettaient pas autrement cette occa-