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remontant même une brise contraire pour revenir à leur point de départ, s’étaient ainsi réellement « dirigées, » elles n’avaient pu y réussir que grâce à des circonstances extrêmement favorables. En de vastes halls clos et couverts, parfait ! Dans une atmosphère calme, très bien ! Par un léger vent de cinq à six mètres à la seconde, passe encore ! Mais, en somme, rien de pratique n’avait été obtenu. Contre un vent de moulin ― huit mètres à la seconde, ― ces machines seraient restées à peu près stationnaires ; contre une brise fraîche ― dix mètres à la seconde, ― elles auraient marché en arrière ; contre une tempête ― vingt-cinq à trente mètres à la seconde, ― elles auraient été emportées comme une plume ; au milieu d’un ouragan ― quarante-cinq mètres à la seconde, ― elles eussent peut-être couru le risque d’être mises en pièces ; enfin, avec un de ces cyclones qui dépassent cent mètres à la seconde, on n’en aurait pas retrouvé un morceau.

Il était donc constant que, même après les expériences retentissantes des capitaines Krebs et Renard, si les aérostats dirigeables avaient gagné un peu de vitesse, c’était juste ce qu’il fallait pour se maintenir contre une simple brise. D’où l’impossibilité d’user pratiquement jusqu’alors de ce mode de locomotion aérienne.

Quoi qu’il en soit, à côté de ce problème de la direction des aérostats, c’est-à-dire, des moyens employés pour leur donner une vitesse propre, la question des moteurs avait fait des progrès incomparablement plus rapides. Aux machines à vapeur d’Henri Giffard, à l’emploi de la force musculaire de Dupuy de Lôme, s’étaient peu à peu substitués les moteurs électriques. Les batteries au bichromate de potasse, formant des éléments montés en tension, de MM. Tissandier frères, donnèrent une vitesse de quatre mètres à la seconde. Les machines dynamo-électriques des capitaines Krebs et Renard, développant une force de douze chevaux, imprimèrent une vitesse de six mètres cinquante, en moyenne.

Et alors, dans cette voie du moteur, ingénieurs et électriciens avaient cherché à s’approcher de plus en plus de ce desideratum qu’on a pu appeler « un cheval-vapeur dans un boîtier de montre » . Aussi, peu à peu, les effets de la pile, dont les capitaines Krebs et Renard avaient gardé le secret, étaient-ils