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serait achevée. Il manœuvrerait alors pour faire déraper son ancre. Si elle était trop solidement engagée dans les roches, il en serait quitte pour couper le câble et reprendrait son vol vers l’Équateur.

On le voit, cette manière de procéder était la plus simple, la meilleure aussi, et elle s’était exécutée à point.

Le personnel de l’Albatros, sachant qu’il n’y avait pas de temps à perdre, se mit résolument à la besogne.

Tandis que l’on travaillait à l’avant de l’aéronef, Uncle Prudent et Phil Evans avaient entre eux une conversation dont les conséquences allaient être d’une gravité exceptionnelle.

« Phil Evans, dit Uncle Prudent, vous êtes bien décidé, comme moi, à faire le sacrifice de votre vie ?

― Oui, comme vous !

― Une dernière fois, il est bien évident que nous n’avons plus rien à attendre de ce Robur ?

― Rien.

― Eh bien, Phil Evans, mon parti est pris. Puisque l’Albatros doit repartir ce soir même, la nuit ne se passera pas sans que nous ayons accompli notre œuvre ! Nous casserons les ailes à l’oiseau de l’ingénieur Robur ! Cette nuit, il sautera au milieu des airs !

― Qu’il saute donc ! » répondit Phil Evans.

On le voit, les deux collègues étaient d’accord sur tous les points, même quand il s’agissait d’accepter avec cette indifférence l’effroyable mort qui les attendait.

« Avez-vous tout ce qu’il faut ?… demanda Phil Evans.

― Oui !… La nuit dernière, pendant que Robur et ses gens ne s’occupaient que du salut de l’aéronef, j’ai pu me glisser dans la soute et prendre une cartouche de dynamite !

― Uncle Prudent, mettons-nous à la besogne…

― Non, ce soir seulement ! Quand la nuit sera venue, nous rentrerons dans notre roufle, et vous veillerez à ce qu’on ne puisse me surprendre ! »

Vers six heures, les deux collègues dînèrent suivant leur habitude. Deux