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Au fond étaient cinq hommes, endormis ou immobilisés par la fatigue, à moins qu’ils ne fussent morts.

L’Albatros, arrivé au-dessus d’eux, descendit lentement.

À l’arrière de cette embarcation, on put lire alors le nom du navire auquel elle appartenait, c’était la Jeannette, de Nantes, un navire français que son équipage avait dû abandonner.

« Aoh ! » cria Tom Turner.

Et on devait l’entendre, car l’embarcation n’était pas à quatre-vingts pieds au-dessous de lui.

Pas de réponse.

« Un coup de fusil ! » dit Robur.

L’ordre fut exécuté, et la détonation se propagea longuement à la surface des eaux.

On vit alors un des naufragés se relever péniblement, les yeux hagards, une vraie face de squelette.

En apercevant l’Albatros, il eut tout d’abord le geste d’un homme épouvanté.

« Ne craignez rien ! cria Robur en français. Nous venons vous secourir !… Qui êtes-vous ?

― Des matelots de la Jeannette, un trois-mâts-barque dont j’étais le second, répondit cet homme. Il y a quinze jours… nous l’avons quitté… au moment où il allait sombrer !… Nous n’avons plus ni eau ni vivres !… »

Les quatre autres naufragés s’étaient peu à peu redressés. Hâves, épuisés, dans un effrayant état de maigreur, ils levaient les mains vers l’aéronef.

« Attention ! » cria Robur.

Une corde se déroula de la plate-forme, et un seau, contenant de l’eau douce, fut affalé jusqu’à l’embarcation.

Les malheureux se jetèrent dessus et burent à même avec une avidité qui faisait mal à voir.

« Du pain !… du pain !… » crièrent-ils.

Aussitôt, un panier contenant quelques vivres, des conserves, un flacon de brandy, plusieurs pintes de café, descendit jusqu’à eux. Le second eut bien de la peine à les modérer dans l’assouvissement de leur faim.