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Qui vernit notre cœur et sa fragilité !
Mais qui par là détruit sa sensibilité !
Le voyage est fort court, et le terme s’approche,
Mais on ne sent plus rien ; on a le cœur de roche
Et l’on se trouve heureux ; et c’est là le bonheur,
Qui saisit l’âme entière, embrasse tout le cœur ;
D’ailleurs sur votre front de trop longues années
Comme à l’ouvrier las de ses tristes journées,
N’ont pas marqué leurs traits ; et l’ennui, le chagrin
Et les pleurs desséchants qui vous brûlent la main ;
Sur vos jeunes cheveux point de blanche couronne,
Celle qu’un Dieu puissant au sage vieillard donne ;
Aux larmes du malheur et de la pauvreté
Le corps joyeux, dispos, droit ne s’est pas vouté ;
Et le front dégarni n’a pas la sage ride
Signe de Dieu qui dit que sagesse y réside ;
Non les membres sont frais, et la joie est au cœur,
L’esprit limpide et droit, mais l’âme fait horreur !
Oui, l’âme fait horreur, car au mal elle s’aiguise
L’esprit est corrompu ; le mal le stygmatise,
Et le marque au cachet du Satan de l’Enfer ;
Rien ne résonne en lui ! — ce n’est que matière !