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p’tit-bonhomme.

« P’tit-Bonhomme, as-tu au moins compté les poules et les poussins du poulailler ?

— Certainement. »

Et tirant son carnet :

« Il y a quarante-trois poules et soixante-neuf poussins ! »

Là-dessus, Sim d’ajouter :

« Tu devrais aussi compter les grains d’avoine que contient chaque sac…

— Ne le plaisantez pas, mes fils ! répliqua Martin Mac Carthy. Cela prouve qu’il a de l’ordre, et l’ordre dans les petites choses, c’est la régularité dans les grandes et dans l’existence. »

Puis, s’adressant à l’enfant :

« Et tes cailloux… lui demanda-t-il, les cailloux que je te remets chaque soir…

— Ils sont serrés dans mon pot, monsieur Martin, répondit P’tit-Bonhomme, et j’en ai déjà cinquante-sept. »

En effet, il y avait cinquante-sept jours qu’il était arrivé à la ferme de Kerwan.

« Eh ! fit Grand-mère, ça lui ferait déjà cinquante-sept pence à un penny le caillou…

— Hein, P’tit-Bonhomme, reprit Sim, que de gâteaux tu pourrais acheter avec cet argent-là !

— Des gâteaux ?… Non, Sim… De beaux cahiers pour écrire, j’aimerais mieux cela ! »

La fin de l’année approchait. Aux bourrasques du mois de novembre avaient succédé de grands froids. Une épaisse couche de neige durcie recouvrait le sol. C’était un spectacle qui ravissait notre petit garçon, de voir les arbres tout blancs de givre avec leurs pendeloques de glace. Et sur les vitres des fenêtres, l’humidité condensée en cristallisations capricieuses, qui formaient de si jolis dessins !… Et la rivière prise d’un bord à l’autre, avec des glaçons qui s’amassaient pour former une énorme embâcle !… Certes, ils n’étaient pas nouveaux pour lui, ces phénomènes de l’hiver, et il les avait sou-