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les deux frères.

Mais le limier était sur leurs traces. Un instant après, Zermah l’aperçut devant l’arbre. Il aboyait avec une fureur croissante et s’élança d’un bond sur le cyprès.

Un coup de coutelas le fit reculer, puis hurler avec plus de violence.

Presque aussitôt, un bruit de pas se fit entendre. Des voix s’appelaient, se répondaient, et, parmi elles, les voix si reconnaissables de Texar et de Squambô.

C’étaient bien l’Espagnol et ses compagnons qui gagnaient du côté du lac, afin d’échapper au détachement fédéral. Ils l’avaient inopinément rencontré dans la cyprière, et, n’étant pas en force, ils se dérobaient en toute hâte. Texar cherchait à regagner l’île Carneral par le plus court, afin de mettre une ceinture d’eau entre les fédéraux et lui. Comme ceux-ci ne pourraient franchir le canal sans une embarcation, ils seraient arrêtés devant cet obstacle. Alors, pendant ces quelques heures de répit, les partisans sudistes chercheraient à atteindre l’autre côté de l’île ; puis, la nuit venue, ils essaieraient d’utiliser la berge pour débarquer sur la rive méridionale du lac.

Lorsque Texar et Squambô arrivèrent en face du cyprès devant lequel le chien aboyait toujours, ils virent le sol rouge du sang qui s’écoulait par une blessure ouverte au flanc de l’animal.

« Voyez !… Voyez ! s’écria l’Indien.

— Ce chien a été blessé ? répondit Texar.

— Oui !… blessé d’un coup de couteau, il n’y a qu’un instant !… Son sang fume encore !

— Qui a pu ?… »

En ce moment, le chien se précipita de nouveau sur le réseau de feuillage que Squambô écarta du bout de son fusil.

« Zermah !… s’écria-t-il.

— Et l’enfant !… répondit Texar.

— Oui !… Comment ont-elles pu s’enfuir ?…

À mort, Zermah, à mort ! »

La métisse, désarmée par Squambô au moment où elle allait frapper l’Espagnol, fut tirée si brutalement de la cavité que la petite fille lui échappa