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nord contre sud.

ment interrogé sur ce qu’il comptait faire de l’enfant et d’elle, allant même des supplications aux menaces.

Pendant qu’elle parlait, l’Espagnol se contentait de fixer sur elle ses yeux froids et méchants. Puis, haussant les épaules, il faisait le geste d’un homme qu’on importune et dédaignait de répondre.

Toutefois, Zermah ne se tenait pas pour battue. Arrivée à l’île Carneral, elle prit la résolution de se retrouver avec Texar, afin d’exciter sa pitié, sinon pour elle, du moins pour cette malheureuse enfant, ou, à défaut de pitié, de le prendre par l’intérêt.

L’occasion se présenta.

Le lendemain, pendant que la petite fille sommeillait, Zermah se dirigea vers le canal.

Texar se promenait en ce moment sur la rive. Il donnait, avec Squambô, quelques ordres à ses esclaves occupés d’un travail de faucardement pour dégager les herbes, dont l’accumulation rendait assez difficile le fonctionnement de la barge.

Pendant cette besogne, deux noirs battaient la surface du canal avec de longues perches, afin d’effrayer les reptiles dont les têtes se dressaient hors des eaux.

Un instant après, Squambô quitta son maître, et celui-ci se disposait à s’éloigner, lorsque Zermah alla droit à lui.

Texar la laissa venir, et, quand la métisse l’eut rejoint, il s’arrêta.

« Texar, dit Zermah d’un ton ferme, j’ai à vous parler. Ce sera la dernière fois, sans doute, et je vous prie de m’entendre. »

L’Espagnol, qui venait d’allumer une cigarette, ne répondit pas. Aussi Zermah, après avoir attendu quelques instants, reprit-elle en ces termes :

« Texar, voulez-vous me dire enfin ce que vous comptez faire de Dy Burbank ? »

Nulle réponse.

« Je ne chercherai pas, ajouta la métisse, à vous apitoyer sur mon propre sort. Il ne s’agit que de cette enfant dont la vie est compromise, et qui vous échappera bientôt… »