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derniers mots et dernier soupir.

régisseurs y déployaient une grande activité sous la direction d’Edward Carrol. Si James Burbank lui laissait le soin de tout réorganiser, c’est qu’il avait, lui, une autre tâche à remplir — celle de retrouver son enfant. Aussi, en prévision d’une campagne prochaine, réunissait-il tous les éléments de son expédition. Un détachement de douze noirs affranchis, choisis parmi les plus dévoués de la plantation, furent désignés pour l’accompagner dans ses recherches. On peut être sûr que ces braves gens s’y appliqueraient de cœur et d’âme.

Restait donc à décider comment l’expédition serait conduite. À ce sujet, il y avait lieu d’hésiter. En effet, sur quelle partie du territoire les recherches seraient-elles d’abord dirigées ? Cette question devait évidemment primer toutes les autres.

Une circonstance inespérée, due uniquement au hasard, allait indiquer avec une certaine précision quelle piste il convenait de suivre au début de la campagne.

Le 19, Gilbert et Mars, partis dès le matin de Castle-House, remontaient rapidement le Saint-John dans une des plus légères embarcations de Camdless-Bay. Aucun des noirs de la plantation ne les accompagnait pendant ces explorations qu’ils recommençaient chaque jour sur les deux berges du fleuve. Ils tenaient à opérer aussi secrètement que possible, afin de ne point donner l’éveil aux espions qui pouvaient surveiller les abords de Castle-House par ordre de Texar.

Ce jour-là, tous deux se glissaient le long de la rive gauche. Leur canot, s’introduisant à travers les grandes herbes, derrière les îlots détachés par la violence des eaux à l’époque des fortes marées d’équinoxe, ne courait aucun risque d’être aperçu. Pour des embarcations naviguant dans le lit du fleuve, il n’eût même pas été visible. Pas davantage de la berge elle-même, dont la hauteur le mettait à l’abri des regards de quiconque se fût aventuré sous son fouillis de verdure.

Il s’agissait, ce jour-là, de reconnaître les criques et les rios les plus secrets que les comtés de Duval et de Putnam déversent dans le Saint-John.

Jusqu’au hameau de Mandarin, l’aspect du fleuve est presque marécageux.