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nord contre sud.

olives, grenades, oranges, goyaves, pêches, figues, marañons, — le tout dans des conditions de bon marché qui rendent la vie agréable et facile en cette partie du territoire floridien.

Quant au service de la voirie, il est généralement fait, non par des balayeurs attitrés, mais par des bandes de vautours que la loi protège en défendant de les tuer sous peine de fortes amendes. Ils dévorent tout, même les serpents, dont le nombre est trop considérable encore, malgré la voracité de ces précieux volatiles.

La verdure ne manque pas à cet ensemble de maisons qui constitue principalement la ville. À l’entrecroisement des rues, de subites échappées permettent au regard de s’arrêter sur les groupes d’arbres dont la ramure dépasse les toits et qu’anime l’incessante jacasserie des perroquets sauvages. Le plus souvent, ce sont de grands palmiers qui balancent leur feuillage à la brise, semblables aux vastes éventails des señoras ou aux pankas indoues. Çà et là s’élèvent quelques chênes enguirlandés de lianes et de glycines, et des bouquets de ces cactus gigantesques dont le pied forme une haie impénétrable. Tout cela est réjouissant, attrayant, et le serait plus encore, si les vautours faisaient consciencieusement leur service. Décidément, ils ne valent pas les balayeuses mécaniques.

On ne trouve à Saint-Augustine qu’une ou deux scieries à vapeur, une fabrique de cigares, une distillerie de térébenthine. La ville, plus commerçante qu’industrielle, exporte ou importe des mélasses, des céréales, du coton, de l’indigo, des résines, des bois de construction, du poisson, du sel. En temps ordinaire, le port est assez animé par l’entrée et la sortie des steamers, employés au trafic et au transport des voyageurs pour les divers ports de l’Océan et le golfe du Mexique.

Saint-Augustine est le siège d’une des six cours de justice qui fonctionnent dans l’État de Floride. Quant à son appareil défensif, élevé contre les agressions de l’intérieur ou les attaques venues du large, il ne consiste qu’en un fort, le fort Marion ou Saint-Marc, construction du dix-septième siècle bâtie à la mode castillane. Vauban ou Cormontaigne en eussent fait peu de cas, sans doute ; mais il prête à l’admiration des archéologues et des anti-