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prise de possession.

— Je vous répète que je n’ai rien à répondre.

— Pas même si, en échange de votre réponse, nous pouvons vous rendre la liberté ?

— Je n’aurai pas besoin de vous pour être libre !…

— Et qui vous ouvrira les portes de cette prison ? s’écria James Burbank, que tant d’impudence mettait hors de lui.

— Les juges que je demande.

— Des juges !… Ils vous condamneront sans pitié !

— Alors je verrai ce que j’aurai à faire.

— Ainsi, vous refusez absolument de répondre ? demanda une dernière fois Gilbert.

— Je refuse…

— Même au prix de la liberté que je vous offre ?

— Je ne veux pas de cette liberté.

— Même au prix d’une fortune que je m’engage…

— Je ne veux pas de votre fortune. Et maintenant, messieurs, laissez-moi. »

Il faut en convenir, James et Gilbert Burbank se sentirent absolument démontés par une telle assurance. Sur quoi reposait-elle ? Comment Texar osait-il s’exposer à un jugement qui ne pouvait aboutir qu’à la plus grave des condamnations ? Ni la liberté, ni tout l’or qu’on lui offrait, n’avaient pu tirer de lui une réponse. Était-ce une inébranlable haine qui l’emportait sur son propre intérêt ? Toujours l’indéchiffrable personnage, qui, même en présence des plus redoutables éventualités, ne voulait pas mentir à ce qu’il avait été jusqu’alors.

« Venez, mon père, venez ! » dit le jeune officier.

Et il entraîna James Burbank hors de la prison. À la porte, ils retrouvèrent M. Harvey, et tous trois allèrent rendre compte au commandant Stevens de l’insuccès de leur démarche.

À ce moment, une proclamation du commodore Dupont venait d’arriver à bord de la flottille. Adressée aux habitants de Jacksonville, elle disait que nul ne serait recherché pour ses opinions politiques, ni pour les faits qui