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après l’enlèvement.

bien Texar qui l’avait fait enlever. À ce sujet, pas de doute possible. Elle avait reconnu l’Espagnol, qui s’était posté à la crique Marino, soit qu’il eût l’intention de pénétrer dans Castle-House en franchissant le tunnel, soit qu’il attendît ses défenseurs au moment où ils tenteraient de s’échapper par cette issue. Si Texar se fut moins pressé d’agir, Mme Burbank et Alice Stannard, comme Dy et Zermah, eussent été maintenant en son pouvoir. S’il n’avait pas dirigé en personne les hommes de la milice et la bande des pillards, c’est qu’il se croyait plus certain d’atteindre la famille Burbank à la crique Marino.

En tout cas, Texar ne pourrait pas nier qu’il eût directement pris part au rapt. Zermah avait jeté, crié son nom. Mme Burbank et miss Alice devaient l’avoir entendu.

Plus tard, lorsque l’heure de la justice serait venue, quand l’Espagnol aurait à répondre de ses crimes, il n’aurait pas la ressource, cette fois, d’invoquer un de ces inexplicables alibis qui ne lui avaient que trop réussi jusqu’alors.

À présent, quel sort réservait-il à ses deux victimes ? Allait-il les reléguer dans les marécageuses Everglades, au delà des sources du Saint-John ? Se déferait-il de Zermah comme d’un témoin dangereux, dont la déposition pourrait l’accabler un jour ? C’est ce que se demandait la métisse. Elle eût volontiers fait le sacrifice de sa vie pour sauver l’enfant enlevée avec elle. Mais, elle morte, que deviendrait Dy entre les mains de Texar et de ses compagnons ? Cette pensée la torturait, et alors elle pressait plus fortement la petite fille sur sa poitrine, comme si Squambô eût manifesté l’intention de la lui arracher.

En ce moment, Zermah put constater que l’embarcation se rapprochait de la rive gauche du fleuve. Cela pouvait-il lui servir d’indice ? Non, car elle ignorait que l’Espagnol demeurât au fond de la Crique-Noire, dans un des îlots de cette lagune, comme l’ignoraient même les partisans de Texar, puisque personne n’avait jamais été reçu au blockhaus qu’il occupait avec Squambô et ses noirs.

C’était là, en effet, que l’Indien allait déposer Dy et Zermah. Dans les