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le dernier campement.

frey, sans prononcer un mot, attendant ce que le jeune novice allait faire, ce qu’il allait dire.

Godfrey ne l’avait pas même aperçu. Ses regards ne pouvaient se détacher du capitaine. Bien qu’il ne l’eût jamais vu, il connaissait ses traits d’après le portrait photographique que Mrs. Branican lui avait donné. Nul doute possible… Cet homme était le capitaine John.

De son côté, John regardait Godfrey avec une émotion non moins extraordinaire. Bien qu’il ne pût deviner quel était ce jeune garçon, il le dévorait des yeux… il lui tendait ses mains… il l’appelait d’une voix tremblante… oui ! il l’appelait comme si c’eût été son fils.

Godfrey se précipita dans ses bras, en s’écriant :

« Capitaine John !

— Oui… moi… c’est moi ! répondit le capitaine John. Mais… toi… mon enfant… qui es-tu ?… D’où viens-tu ?… Comment sais-tu mon nom ?… »

Godfrey ne put répondre. Il était devenu effroyablement pâle en apercevant Len Burker, et, ne pouvant maîtriser l’horreur qu’il éprouvait à la vue de ce misérable :

« Len Burker ! » s’écria-t-il.

Len Burker, après avoir réfléchi aux suites de cette rencontre, ne pouvait que s’en féliciter. N’était-ce pas le plus heureux des hasards, qui lui livrait à la fois Godfrey et John ? N’était-ce pas une incroyable chance que d’avoir à sa merci le père et l’enfant ? Aussi, s’étant retourné vers les noirs, leur fit-il signe de séparer Godfrey et John, de les saisir…

« Len Burker !… répéta Godfrey !

— Oui, mon enfant, répondit John, c’est Len Burker… celui qui m’a sauvé…

— Sauvé ! s’écria Godfrey. Non, capitaine John, non, Len Burker ne vous a pas sauvé !… Il a voulu vous perdre, il nous a abandonnés, il a volé votre rançon à mistress Branican… »

À ce nom, John répondit par un cri, et, saisissant la main de Godfrey :

« Dolly ?… Dolly ?… répétait-il.