Page:Verne - Mistress Branican, Hetzel, 1891.djvu/251

Cette page a été validée par deux contributeurs.
202
mistress branican.

delà de cinq heures pendant le mois d’août. La lune, qui entrait dans son premier quartier, disparut promptement entre les brumes de l’horizon. L’obscurité profonde empêchait de voir les dispositions littorales du continent.

La navigation du détroit fut ressentie à bord par les coups de tangage qu’éprouva le paquebot sous l’influence d’un clapotis très houleux. Les courants et contre-courants luttent avec impétuosité dans cette étroite passe, ouverte aux eaux du Pacifique.

Le lendemain, 23 août, dès l’aube, le Brisbane se présenta à l’entrée de la baie de Port-Phillip. Une fois au milieu de cette baie, les navires n’ont plus rien à redouter des mauvais temps ; mais, pour y pénétrer, il est nécessaire de manœuvrer avec prudence et précision, surtout lorsqu’il s’agit de doubler la longue pointe sablonneuse de Nepean d’un côté et celle de Queenscliff de l’autre. La baie, suffisamment fermée, se découpe en plusieurs ports, où les bâtiments de fort tonnage trouvent des mouillages excellents, Goelong, Sandrige, Williamstown, – ces deux derniers formant le port de Melbourne. L’aspect de cette côte est triste, monotone, sans attrait. Peu de verdure sur les rives, l’aspect d’un marécage presque desséché, qui, au lieu de lagons ou d’étangs, ne montre que des entailles aux vases durcies et fendillées. À l’avenir de modifier la surface de ces plaines, en remplaçant les squelettes d’arbres qui grimacent çà et là par des futaies, dont le climat australien fera rapidement des forêts superbes.

Le Brisbane vint se ranger à l’un des quais de Williamstown, afin d’y débarquer une partie des passagers.

Comme on devait faire escale pendant trente-six heures, Mrs. Branican résolut de passer ce temps à Melbourne. Non qu’elle eût affaire en cette ville, puisque ce n’était qu’à Adélaïde qu’elle s’occuperait des préparatifs d’une expédition devant atteindre probablement les extrêmes limites de l’Ouest-Australie. Dès lors, pourquoi en vint-elle à quitter le Brisbane ? Craignait-elle d’être l’objet de trop nombreuses et trop fréquentes visites ? Mais, pour y échapper,