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mistress branican.

Ellis, que le Franklin a dû traverser la mer de Java, en faisant route sur Singapore…

— En partie du moins, monsieur Andrew, puisque c’est entre Singapore et l’île Célèbes que le naufrage a pu se produire.

— Soit, vous dis-je. Mais comment l’épave a-t-elle dérivé jusqu’aux parages de l’Australie, si le Franklin s’est brisé sur quelque écueil de la mer de Java ?

— Cela ne peut se comprendre que d’une façon, répondit le capitaine Ellis, en admettant que cette épave a été entraînée à travers le détroit de la Sonde ou l’un des autres détroits qui séparent ces îles des mers de Timor et d’Arafoura.

— Les courants portent-ils de ce côté ?…

— Oui, monsieur Andrew, j’ajouterai même que si le Franklin était désemparé à la suite de quelque tempête, il a pu être drossé dans l’un de ces détroits, pour aller finalement se perdre sur les récifs au nord du littoral australien.

— En effet, mon cher Ellis, répondit M. William Andrew, c’est la seule hypothèse plausible, et, dans ce cas, si une épave a été rencontrée au large de l’île Melville, six ans après le naufrage, c’est qu’elle s’est récemment détachée des écueils sur lesquels s’est fracassé le Franklin ! »

Cette explication, très sérieuse, pas un marin n’aurait accepté de la combattre.

Mrs. Branican, dont les regards ne s’étaient point distraits de la carte déployée devant elle, dit alors :

« Puisque le Franklin a été vraisemblablement jeté sur la côte de l’Australie, et puisque les survivants du naufrage n’ont pas reparu, c’est qu’ils sont prisonniers d’une peuplade indigène…

— Cela, Dolly, cela n’est pas impossible… et pourtant… » répondit M. William Andrew.

Mrs. Branican allait protester avec énergie contre le doute que laissait pressentir la réponse de M. William Andrew, lorsque le capitaine Ellis crut devoir dire :