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mistress branican.

la malheureuse Dolly, se demandant si son intelligence aurait résisté à ce dernier coup, le plus terrible de ceux qui l’eussent frappée.

Lorsque Mrs. Branican eut repris peu à peu ses sens, elle avait conscience de ce qui venait de lui être révélé !… Elle était revenue à la vie avec toute sa raison !… Et, à travers ses larmes, son regard interrogeait M. William Andrew, qui lui tenait les mains, agenouillé près d’elle.

« Parlez… parlez… monsieur Andrew ! »

Et ce furent les seuls mots qui purent s’échapper de ses lèvres. Alors, d’une voix entrecoupée de sanglots, M. William Andrew lui apprit quelles inquiétudes avait d’abord causées le défaut de nouvelles relatives au Franklin… Lettres et dépêches avaient été envoyées à Singapore et aux Indes, où le bâtiment n’était jamais arrivé… une enquête avait été faite sur le parcours du navire de John !… Et aucun indice n’avait pu mettre sur la trace du naufrage ! Immobile, Mrs. Branican écoutait, la bouche muette, le regard fixe. Et lorsque M. William Andrew eut achevé son récit :

« Mon enfant mort… mon mari mort… murmura-t-elle. Ah ! pourquoi Zach Fren ne m’a-t-il pas laissée mourir ! »

Mais sa figure se ranima soudain, et son énergie naturelle se manifesta avec tant de puissance, que le docteur Brumley en fut effrayé.

« Depuis les dernières recherches, dit-elle d’une voix résolue, on n’a rien su du Franklin ?…

— Rien, répondit M. William Andrew.

— Et vous le considérez comme perdu ?…

— Oui… perdu !

— Et de John, de son équipage, on n’a obtenu aucune nouvelle ?…

— Aucune, ma pauvre Dolly, et maintenant, nous n’avons plus d’espoir…

— Plus d’espoir ! » répondit Mrs. Branican d’un ton presque ironique.