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personne et payant bien, d’un courage à toute épreuve, d’une ténacité qui ne cédait devant aucun obstacle, d’un entêtement de Breton bretonnant ! Regrettait-il la mer ?… Non, puisqu’il l’avait quittée en pleine force de l’âge. Sa santé entrait-elle pour quelque chose en cette résolution ?… Aucunement, taillé qu’il était dans le pur granit des côtes armoricaines.

En effet, il suffisait de le regarder, de l’entendre, de recevoir une de ses poignées de main dont il ne se montrait point avare. Que l’on se figure un homme trapu, de stature moyenne, de large encolure. Voici son signalement détaillé : caboche celtique ; crinière rude hérissée en porc-épic ; face hâlée, tannée, cuite et recuite au court-bouillon de l’eau de mer, surchauffée par le soleil des basses latitudes ; collier de barbe drue comme du lichen de roches, dont les fils grisonnants se marient à ceux de la chevelure ; yeux vifs, véritables escarboucles au fond de l’arcade sourcilière, avec l’iris d’un noir de jais et une de ces pupilles qui lancent des étincelles félines ; nez gros du bout, assez long pour y achevaler les pinces du jeu de la drogue, ayant deux creux