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Là était le danger, en effet. Sous ces eaux calmes, sans brisants, il est malaisé de reconnaître les roches qui les affleurent. Nul indice ne désigne le chenal à suivre. Il semblait que les abords fussent très francs. Aucune apparence de récifs. Le maître d’équipage, qui jetait la sonde, ne constatait nulle part un relèvement brusque du fond de la mer.

Voici, au surplus, l’aspect que présentait l’îlot, vu à un mille de distance, à cette heure où le soleil l’éclairait obliquement de l’est à l’ouest, après s’être dégagé des quelques brumes dont il était baigné au lever du jour :

C’était bien un îlot, et rien qu’un îlot, dont un État n’eût point songé à revendiquer la possession, car il n’en valait pas la peine — sauf l’accapareuse Angleterre, cela va sans dire. Et, ce qui prouvait surabondamment que cet amas rocheux était inconnu des navigateurs et des hydrographes, qu’il ne pouvait figurer sur les cartes les plus modernes, c’est que la Grande-Bretagne n’en avait pas encore fait un autre Gibraltar pour commander ces parages. Sans doute, il était situé en dehors des routes maritimes, et d’ailleurs, c’est à peine s’il venait de naître.