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sûre, car c’est la moins fréquentée. Belle promenade d’une quinzaine de lieues sur une pente inclinée !

— Va pour le chemin le plus long, et en route ! dit Martinez. — Où coucherons-nous ce soir ?

— Mais, en filant douze nœuds, à Cuernavaca, répondit le gabier.

Les deux Espagnols se rendirent à l’écurie, firent seller leurs chevaux, et remplirent leurs « mochillas », sortes de poches qui font partie du harnachement, de galettes de maïs, de grenades et de viandes séchées, car dans les montagnes ils couraient risque de ne pas trouver une nourriture suffisante. La dépense payée, ils enfourchèrent leurs bêtes et appuyèrent sur la droite.

Pour la première fois, ils aperçurent le chêne, arbre de bon augure, au pied duquel s’arrêtent les émanations malsaines des plateaux inférieurs. Dans ces plaines situées à quinze cents mètres au-dessus du niveau de la mer, les productions importées depuis la conquête se mêlaient à la végétation indigène. Des champs de blé s’étalaient dans cette fertile oasis, où poussent toutes les céréales européennes. Les arbres d’Asie et de France y entremêlaient leurs feuillages. Les fleurs de l’Orient émaillaient les tapis de verdure, unies aux violettes, aux bluets, à la verveine, à la pâquerette des zones tempérées. Quelques grimaçants arbustes résineux venaient accidenter çà et là le paysage, et l’odorat était parfumé des douces émanations de la vanille, que protégeait l’ombre des amyris et des liquidembars. Aussi, les deux aventuriers se sentaient-ils à l’aise sous cette température moyenne de vingt à vingt-deux degrés, commune aux zones de Xalapa et de Chilpanzingo, que l’on a comprises sous la dénomination de « terres tempérées ».

Cependant, Martinez et son compagnon s’élevaient de plus en plus sur le plateau de l’Anahuac, et franchissaient les immenses barrières qui forment la plaine de Mexico.

« Ah ! s’écria José, voici le premier des trois torrents que nous devons traverser ! »

En effet, une rivière, profondément encaissée, se creusait devant les pas des voyageurs.

« À mon dernier voyage, ce torrent était à sec, dit José. — Suivez-moi, lieutenant. »

Tous deux descendirent par une pente assez douce taillée dans le rocher même, et ils arrivèrent à un gué qui était aisément praticable.

« Et d’un ! fit José.

— Les autres sont-ils également franchissables ? demanda le lieutenant.