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remords s’agitaient en lui, et il ne se rendait pas compte de l’obsession à laquelle il était en proie.

La nuit était tout à fait venue. Les voyageurs pressèrent le pas. Ils traversèrent sans s’arrêter les petits villages de Contepec et d’Iguala, et ils arrivèrent à la ville de Tasco.

José avait dit vrai. C’était une grande cité auprès des minces bourgades qu’ils avaient laissées en arrière. Une sorte d’auberge s’ouvrait sur la plus large rue. Après avoir remis leurs chevaux à un valet d’écurie, ils entrèrent dans la salle principale, où se dressait une longue et étroite table toute servie.

Les Espagnols y prirent place, l’un vis-à-vis de l’autre, et entamèrent un repas qui eût été succulent pour des palais indigènes, mais que la faim seule pouvait rendre supportable à des palais européens. C’étaient des débris de poulets nageant dans une sauce au piment vert, des portions de riz accommodé de piment rouge et de safran, de vieilles volailles farcies d’olives, de raisins secs, d’arachides et d’oignons, des courges sucrées, des carbanzos et des pourpiers, le tout accompagné de « tortillas », sorte de galettes de maïs cuites sur une plaque de fer. Puis on servit à boire, après le repas.

Quoi qu’il en soit, à défaut du goût, la faim fut satisfaite, et la fatigue ne tarda pas à endormir Martinez et José jusqu’à une heure avancée du jour.


IV

DE TASCO À CUERNAVACA.



Le lieutenant fut le premier éveillé.

« José, en route ! » dit-il.

Le gabier étendit les bras.

« Quel chemin prenons-nous ? demanda Martinez.

— Ma foi, j’en connais deux, lieutenant.

— Lesquels ?

— L’un qui passe par Zacualican, Tenancingo et Toluca. De Toluca à Mexico, la route est belle, car on a déjà escaladé la Sierra Madre.

— Et l’autre ?

— L’autre nous écarte un peu dans l’est, mais aussi, nous arrivons près des belles montagnes du Popocatepelt et de l’Icctacihualt. C’est la route la plus