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« Chut !… dit Martinez, s’arrêtant court. Que vois-je là-bas ? »

José se dressa sur ses étriers.

« Il n’y a personne, répondit-il.

— J’ai vu un homme disparaître rapidement ! répéta Martinez.

— Imagination !

— Je l’ai vu ! reprit le lieutenant impatienté.

— Eh bien !… cherchez à votre aise… »

Et José continua sa route.

Martinez s’avança seul vers une touffe de ces mangliers, dont les branches, qui prennent racine dès qu’elles touchent le sol, forment des fourrés impénétrables.

Le lieutenant mit pied à terre. La solitude était complète.

Soudain, il aperçut une sorte de spirale remuer dans l’ombre. C’était un serpent de petite espèce, la tête écrasée sous un quartier de roche, et dont la partie postérieure du corps se tordait encore comme si elle eût été galvanisée.

« Il y avait quelqu’un ici ! » s’écria le lieutenant.

Martinez, superstitieux et coupable, regarda de toutes parts. Il se prit à frissonner.

« Qui ? qui ?… murmura-t-il.

— Eh bien ? demanda José, qui avait rejoint son compagnon.

— Ce n’est rien ! répondit Martinez. Marchons ! »

Les voyageurs côtoyèrent alors les rives de la Mexala, petit affluent du rio Balsas, dont ils remontèrent le cours. Bientôt quelques fumées trahirent la présence d’indigènes, et la petite ville de Tutela-del-Rio apparut. Mais les Espagnols, ayant hâte de gagner Tasco avant la nuit, la quittèrent, après quelques instants de repos.

Le chemin devenait très-abrupt. Aussi le pas était-il l’allure la plus ordinaire de leurs montures. Çà et là, des forêts d’oliviers apparurent sur le flanc des monts. De notables différences se manifestaient alors dans le terrain, dans la température, dans la végétation.

Le soir ne tarda pas à tomber. Martinez suivait à quelques pas son guide José. Celui-ci ne s’orientait pas sans peine au milieu des ténèbres épaisses, et il cherchait les sentiers praticables, maugréant, tantôt contre une souche qui le faisait buter, tantôt contre une branche d’arbre qui lui fouettait la figure et menaçait d’éteindre l’excellent cigare qu’il fumait.

Le lieutenant laissait son cheval suivre celui de son compagnon. De vagues