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dix-sept-fois.

mination de son ancien courtier de la Tripolitaine ? Qu’il y eût en lui quelquefois des révoltes, Sarcany ne l’en tenait pas moins par un ascendant irrésistible, et le misérable était tombé si lourdement que la force lui manquait pour se relever. Aussi Sarcany ne s’inquiétait-il même plus de ces velléités qui prenaient son complice de se soustraire à son influence. La brutalité de ses réponses, l’implacabilité de sa logique, avaient bientôt remis Silas Toronthal sous le joug.

En quittant Raguse dans les conditions qui n’ont point été oubliées, le premier soin des deux associés avait été de mettre Sava en lieu sûr sous la garde de Namir. Et maintenant, dans cette retraite de Tétuan, perdue sur les confins de la région marocaine, il eût été difficile, sinon impossible, de la découvrir. Là, l’impitoyable compagne de Sarcany s’était chargée de briser la volonté de la jeune fille pour lui arracher son consentement à ce mariage. Inébranlable dans sa répulsion, se fortifiant dans le souvenir de Pierre, Sava avait jusqu’alors obstinément résisté. Mais le pourrait-elle toujours ?

Entre temps, Sarcany n’avait cessé d’exciter son compagnon à se lancer dans les folies du jeu, bien que lui-même y eût dévoré sa propre fortune. En France, en Italie, en Allemagne, dans les grands