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la fête des cigognes.

mœurs, d’intelligence hors ligne, et surtout de grand sens, puisque la légende affirme qu’ils n’habitent jamais une contrée dont le nom figure sur une pièce d’argent, — l’argent étant la source de tous les maux et le plus puissant mobile qui entraîne l’homme à l’abîme de ses mauvaises passions.

Or, ces cigognes, voyant l’état de perversité dans lequel vivaient les Djins, se réunirent un jour en assemblée délibérative, et décidèrent de dépêcher l’une d’elles au prophète Suleyman, afin de signaler à sa juste vengeance les assassins du missionnaire.

Aussitôt le prophète d’appeler sa huppe, qui est son courrier favori, et de lui donner ordre d’amener dans les hautes zones du ciel africain toutes les cigognes de la terre.

C’est ce qui fut fait, et, quand les innombrables phalanges de ces oiseaux furent réunies devant le prophète Suleyman, dit textuellement la légende, « elles formaient un nuage, qui aurait mis à l’ombre tout le pays entre Mezda et Morzouq. »

Alors chacune, après avoir pris une pierre dans son bec, se dirigea vers le territoire des Djins. Puis, planant au-dessus, elles lapidèrent cette mauvaise race, dont les âmes sont maintenant enfermées pour l’éternité au fond du désert de Hammada.

Telle est cette fable qui allait être mise en scène