Page:Verne - Mathias Sandorf, Hetzel, 1885, tome 3.djvu/187

Cette page a été validée par deux contributeurs.

181
la fête des cigognes.

se pressaient des marchands de Ghadamès et de Sokna avec l’escorte de leurs esclaves noirs ; puis, des Juifs et des Juives de la province, celles-ci, le visage découvert, grasses comme il convient au pays, et « encaleçonnées » de façon peu gracieuse ; puis, des nègres, venus d’un village voisin, après avoir quitté leurs misérables cabanes de joncs et de palmes, pour assister à cette réjouissance publique, — moins riches de linge que de bijoux, grossiers bracelets de cuivre, colliers de coquillages, « rivières » de dents de bêtes, anneaux d’argent aux lobes des oreilles et au cartilage du nez ; puis, des Benouliès, des Awâguirs, originaires des rivages de la grande Syrie, auxquels le dattier de leur pays fournit le vin, les fruits, le pain et les confitures. Enfin, au milieu de cette agglomération de Maures, de Berbères, de Turcs, de Bédouins et même de « Mouçafirs », qui sont les Européens, paradaient des pachas, des cheiks, des cadis, des caïds, tous seigneurs de l’endroit, fendant la foule des râayas, qui s’ouvrait humblement et prudemment devant le sabre nu des soldats ou le bâton de police des zaptiès, lorsque passait, dans son indifférence auguste, le gouverneur général de ce cyâlet africain, de cette province de l’empire turc, dont l’administration relève du Sultan.