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une poignée de main de cap matifou.

La nuit était magnifique. De la lune, à inonder de lumière toute la campagne. Réverbérée par le miroir de la rivière, elle rendait un peu mou le dessin des hauteurs à l’horizon du nord. Au loin, blanchissait la ville de Tétuan, — une tache éclatante dans les basses brumes du fond.

L’Arabe menait bon train sa petite troupe. Deux ou trois fois, il fallut s’arrêter devant des postes isolés, dont la fenêtre, sur la partie non éclairée par la lune, lançait une lueur jaunâtre à travers l’ombre. Alors sortaient un ou deux Marocains, balançant une lanterne blafarde, qui venaient conférer avec le guide. Puis, après avoir échangé quelques mots de reconnaissance, on se remettait en route.

Le docteur ni ses compagnons ne parlaient. Absorbés dans leurs pensées, ils laissaient aller les mules, habituées à ce chemin de la plaine, çà et là raviné, jonché de cailloux ou embarrassé de racines qu’elles évitaient d’un pied sûr. La plus solide de ces vigoureuses bêtes, cependant, restait quelquefois en arrière. Il n’aurait pas fallu la mésestimer pour cela : elle portait Cap Matifou.

Ce qui amenait Pointe Pescade à faire cette réflexion :

« Peut-être eût-il été préférable que Cap Matifou