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l’apparition.

pondit le vieillard, et, soit que madame Bathory l’ait perdue ou détruite, soit qu’on la lui ait prise, je n’ai jamais su ce qu’elle contenait ! »

Il y avait là un mystère. Le docteur, qui avait écouté ce récit sans prononcer une parole, ne savait comment expliquer cette démarche de Mme Bathory. Quel impérieux motif avait donc pu la pousser vers cet hôtel du Stradone dont tout devait l’écarter, et pourquoi, en apprenant la disparition de Silas Toronthal, avait-elle éprouvé une si violente secousse qu’elle était devenue folle ?

Le récit du vieux serviteur fut achevé en quelques instants. Après avoir réussi à cacher l’état de Mme Bathory, il s’occupa de réaliser les dernières ressources qui leur restaient. La folie, calme et douce, de la malheureuse veuve lui avait permis d’agir sans exciter aucun soupçon. Quitter Raguse, se réfugier n’importe où, à la condition que ce fût loin de cette ville maudite, il ne voulait pas autre chose. Quelques jours plus tard, il parvint à s’embarquer avec Mme Bathory sur un de ces paquebots qui font le service du littoral méditerranéen, et il arriva à Tunis ou plutôt à la Goulette. C’est là qu’il prit la résolution de s’arrêter.

Et alors, au fond de ce marabout abandonné, le vieillard se donna tout entier aux soins nécessités