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mathias sandorf.

vaste manteau arabe, jeté en désordre sur ce rivage. Hors des plis du manteau paissaient des moutons et des chèvres, de loin, semblables à de gros corbeaux noirs, dont un seul coup de feu eût fait envoler la bande criarde. Une dizaine de chameaux, les uns allongés sur le sable, les autres immobiles comme s’ils eussent été pétrifiés, ruminaient près d’une étroite lisière de roches qui pouvait servir de quai de débarquement.

Tout en passant devant l’anse de Sîdi-Yousouf, le docteur put observer qu’on mettait à terre des munitions, des armes, et même quelques petites pièces de campagne. Par sa situation éloignée sur les confins littoraux de la régence de Tunis, l’anse de Sîdi-Yousouf ne se prêtait que trop aisément à ce genre de contrebande.

Luigi fit remarquer au docteur le débarquement qui se faisait alors sur cette plage.

« Oui, Luigi, répondit-il, et, si je ne me trompe, ce sont des Arabes qui viennent prendre livraison d’armes de guerre. Ces armes sont-elles destinées aux montagnards pour combattre les troupes françaises, qui viennent de débarquer en Tunisie, je ne sais trop que penser ! Ne serait-ce pas plutôt pour le compte de ces nombreux affiliés du Senoûsisme, pirates de terre ou pirates de mer, dont la concen-