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mathias sandorf.

doute à cet égard. Mais comment s’y prendrait-il ? C’est ce qu’il ne déciderait qu’après inspection des lieux et suivant les circonstances, soit en faisant enlever l’Espagnol par force, soit même en facilitant son évasion du préside de Ceuta.

Cette fois, le docteur ne chercha point à garder l’incognito, — au contraire. Déjà les agents, venus à bord, avaient répandu le bruit de l’arrivée d’un si fameux personnage. Qui ne connaissait de réputation, dans tout ce pays arabe, depuis Suez jusqu’au Cap Spartel, le savant taleb, maintenant retiré dans son île d’Antékirtta, au fond de la mer des Syrtes ? Aussi les Espagnols comme les Marocains lui firent-ils grand accueil. D’ailleurs, il ne fut point interdit de visiter le Ferrato, et de nombreuses embarcations ne tardèrent pas à l’accoster.

Tout ce bruit entrait évidemment dans le plan du docteur. Sa célébrité devait venir en aide à ses projets. Pierre et lui ne cherchèrent donc point à se soustraire à l’empressement du public. Une calèche découverte, prise au principal hôtel de Ceuta, leur fit d’abord visiter la ville, ses rues étroites, bordées de tristes maisons, sans cachet ni couleur, çà et là, de petites places avec des arbres amaigris et poussiéreux, abritant quelque méchante guinguette, un ou deux édifices civils, ayant l’aspect