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mathias sandorf.

la prodigieuse adresse de Pointe Pescade, sans l’extraordinaire force de son compagnon, tous deux eussent peut-être fait quelque mortelle chute.

Cependant, après avoir vingt fois risqué leur vie, ils atteignirent les dernières roches au niveau de la mer. Là, le rivage est formé d’une succession de petites criques, capricieusement découpées dans le massif grésien, bloquées de hautes parois rougeâtres, bordées de récifs ferrugineux qui donnent aux petites lames du ressac des teintes de sang.

Le jour commençait à se faire, lorsque Pointe Pescade trouva un abri au fond de l’une de ces anfractuosités que les mouvements de la falaise ont évidées à l’époque des commotions géologiques, et dans laquelle on pouvait déposer Silas Toronthal pour l’y laisser à la garde de Cap Matifou.

Celui-ci l’y transporta, sans que le banquier parût s’en apercevoir, sans qu’il s’inquiétât de ce qu’on faisait de lui.

Puis, Pointe Pescade, s’adressant à Cap Matifou :

« Tu vas rester là, mon Cap ! dit-il.

— Tout le temps qu’il faudra.

— Même douze heures, au cas où je serais douze heures absent ?

— Même douze heures.

— Et sans manger ?…