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le dernier enjeu.

naco !… Il nous reste une somme suffisante pour gagner Tétuan, et là, nous achèverons notre œuvre !

— Non !… Non !… Laissez-moi, Sarcany, laissez-moi ! » répondait Silas Toronthal.

Et il le repoussait violemment, lorsque l’autre voulait le saisir. Puis, il s’élançait avec une telle rapidité que Sarcany avait quelque peine à le rejoindre. Inconscient de ses actes, Silas Toronthal risquait à chaque pas de tomber dans les ravines abruptes au-dessus desquelles se déroule le lacet des sentiers. Une seule pensée le dominait jusqu’à l’obsession : fuir Monte-Carlo, où s’était consommée sa ruine, fuir Sarcany, dont les conseils l’avaient conduit à cette misère, fuir enfin, au hasard, sans savoir où il irait, sans savoir ce qu’il deviendrait ?

Sarcany sentait bien qu’il n’aurait plus raison de son complice, que celui-ci allait lui échapper ! Ah ! si le banquier n’eût pas connu des secrets qui pouvaient le perdre, ou, à tout le moins, irrémédiablement compromettre la dernière partie qu’il voulait jouer encore, comme il se fût peu inquiété de l’homme qu’il avait entraîné au bord de cet abîme ! Mais, avant d’y tomber, Silas Toronthal pouvait jeter un dernier cri, et c’était ce cri qu’il fallait étouffer !

Alors, de la pensée du crime auquel il était résolu, à son exécution immédiate, il n’y avait plus qu’un