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mathias sandorf.

qu’un mot, m’aurait fait bien plaisir, — surtout si ce mot avait été : Venez ! »

Le mot n’arriva pas. Cette fois, Mme Bathory ne parvint pas sans peine à calmer les impatiences de son fils. Il se désespérait, et, maintenant, ce fut à elle de lui rendre un peu d’espoir, bien qu’elle ne fût pas sans inquiétudes. La maison de la rue Marinella était ouverte au docteur, il ne pouvait l’ignorer, et même sans ce nouvel intérêt qu’il portait à Pierre, l’intérêt que lui inspirait cette famille, pour laquelle il avait déjà manifesté tant de sympathie, n’eût-il pas dû suffire à l’attirer ?

Il arriva donc que Pierre, après avoir compté les jours et les heures, n’eut plus la force de résister. Il lui fallait à tout prix revoir le docteur Antékirtt. Une invincible force le poussait vers Gravosa. Une fois à bord de la goélette, on comprendrait son impatience, on excuserait sa démarche, même si elle était prématurée.

Le 7 juin, dès huit heures du matin, Pierre Bathory quitta sa mère, sans lui rien dire de ses projets. Il sortit de Raguse et gagna Gravosa d’un pas rapide que Pointe Pescade aurait eu quelque peine à suivre, s’il n’eût été si alerte. Arrivé sur le quai, en face du poste de mouillage qu’occupait la Savarèna à sa dernière visite, il s’arrêta.